Pilotin du cap Horn (un roman d'Yvon Mauffret)

Publié le par Cédric B.

Titre : Pilotin du cap Horn
Catégorie : roman pour la jeunesse
Auteur : Yvon Mauffret
Date de l'édition : 1988 (1ère édition : 1970)
Éditeur : Éditions Milan (collection Zanzibar)
Format : 159 pages (11 x 18 cm)
Prix : variable selon le marché de l'occasion (4 à 10€ en général)

Les premières phrases : « Augustin Espérandieu poussa violemment la porte de communication entre son bureau directorial et la vaste pièce où travaillaient ses commis.
- Je sors, aboya-t-il. Si on me demande, je reviendrai cet après-midi !
Il cueillit son canotier à la patère, près de la porte d'entrée, l'enfonça sur sa tête et se saisit de sa canne à bec d'albatros ».
L'extrait : « Pour Étienne, qui en était encore à essayer de ne pas confondre misaine et artimon, un tel savoir relevait de la magie. Il affectait d'ailleurs de s'en moquer. Il avait décidé d'obéir scrupuleusement aux ordres, quels qu'ils fussent, de ne jamais protester, de garder un calme supérieur. Il briquait le pont à grands coups de faubert, il astiquait les cuivres du compas ou du charnier à eau, il lessivait les peintures des roufs avec la même égalité d'humeur, mais avec une petite moue qu'il estimait de son devoir de conserver pour bien marquer que s'il condescendait à jouer le jeu, il n'en était pas dupe. Il ne se rendait pas compte de ce que cette attitude pouvait avoir d'odieux. Les officiers, le bosco, les hommes auraient très bien admis qu'il "groume", qu'il "rouspète", et plus d'un, alors, l'aurait aidé volontiers à passer le cap difficile de l'initiation à la mer. Mais ces sourcils relevés, ce demi-sourire ! "Il a juré de me faire avaler ma chique de travers, confiait parfois Furic à Ézanno, le maître coq. Il y a des moments où j'ai grande envie de lui envoyer un "pare à virer" à travers sa jolie frimousse ! Étienne s'enfermait dans son personnage, le coeur gros, sans voir comment il pourrait désormais changer d'attitude. Dieu sait pourtant qu'il aurait eu besoin de soutien, de réconfort, d'amitié ! »
Les dernières phrases : « Étienne se leva : il avait maintenant les épaules larges... Maria, en le regardant, se souvint avec attendrissement du petit jeune homme fluet et pommadé qui avait fait son apparition sur la dunette de la Bérénice de Swansea, il y avait un an de cela ! Un an seulement ! Il lui semblait qu'elle le connaissait et qu'elle l'aimait depuis toujours.
- En tous cas, dit-elle en riant, le cap Horn a fait de toi un fier brin de matelot !
- Tu trouves... Tu trouves vraiment la Maria ?
Il la regardait soudain avec une telle fierté qu'elle cessa de rire. Elle secoua la tête longuement en le regardant bien droit ; tout au fond de ses yeux bleus.
- Dame oui ! dit-elle seulement ».

pilotinducaphorn.jpg

Commentaires :
Auteur de jeunesse prolifique et qui eut son heure de gloire, par exemple avec Pépé la Boulange, Yvon Mauffret connaît bien le monde de la mer. Né à Lorient en 1927, il est fils d'un capitaine dans la marine marchande et a lui-même beaucoup navigué. Pilotin du cap Horn témoigne de cette intime connaissance du monde nautique. Le vocabulaire employé nous plonge dans un univers poétique ou se côtoient mots techniques et jurons du franc-parler des marins.
Pilotin du cap Horn est dans la veine de ces oeuvres pour qui la mer est une éducatrice. Sur ce blog, nous avons déjà présenté sur ce thème Lame de fond ou Capitaines courageux. De quoi s'agit-il dans Pilotin du cap Horn ? Augustin Espérandieu désespère de son fils, Étienne. Élève médiocre et indiscipliné, celui-ci s'est de nouveau fait renvoyer de l'établissement privé où il était inscrit. Le riche armateur nantais prend alors une grande décision : envoyer son fils sur la Bérénice, le navire amiral de sa flotte commerciale, qui doit quitter Swansea en juillet 1901 pour se rendre au Chili avant de revenir à Nantes. Il exige qui celui-ci soit traité comme un pilotin, sans le moindre privilège. Fier et orgueilleux, Étienne accepte de s'embarquer. Mais les épreuves se révèlent plus difficiles que prévues et sa morgue le coupe de l'équipage. Il peinera pour regagner son estime ainsi que celle de Maria, la fille du capitaine. Le navire trace sa route jusqu'au cap Horn où il subit une violente tempête. Il doit au même moment faire face à un péril bien plus grand : les 4000 tonnes de charbon chargées dans ses soutes sont en train de s'embraser !
Ce récit est servi par une écriture de qualité. Quelques maladresses ou répétitions vous sortent parfois de votre rêverie mais dans l'ensemble les lignes coulent et vous bercent doucement. Certes, l'histoire est assez convenue et ne réserve pas de grande surprise. Mais on se plaît à suivre l'itinéraire de ce jeune nigaud attachant qui grandit, dans tous les sens du terme. On apprécie également la manière dont l'auteur nous fait partager la vie des marins du début du siècle passé.

 

En bref : Une oeuvre tendre et optimiste aux couleurs sépias.


> La semaine prochaine : Abyss (un film de James Cameron).

> Dans deux semaines : Légendes et superstitions des gens de mer (un ouvrage de Béatrice Bottet).


Publié dans Romans

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article